ANALYSE - Conçue de manière efficace, l’évacuation des eaux pluviales répond aux enjeux écologiques,mais elle est d’abord prévue pour protéger votre maison des infiltrations. Différentes solutions sont envisageables pour mettre en place un système d’évacuation performant, encore faut-il connaître les normes et réglementations. Par Sylvie Lenormand, journaliste
Quand l’eau de pluie tombe sur votre maison, elle dévale naturellement les pentes du toit pour se déverser dans des gouttières ou dans un cheneau encastré dans le corps du toit ou parfois dans un siphon lorsqu’il s’agit d’un toit plat ou d’un toit terrasse. Une fois en bas du bâtiment, l’eau pluviale peut tout simplement s’écouler dans le terrain, être évacuée vers un réseau collectif urbain ou privé ou encore être collectée. Certaines règles régissent l’écoulement des eaux pluviales. L’article 681 du Code civil indique notamment que « tout propriétaire doit établir des toits de manière que les eaux pluviales s’écoulent sur son terrain ou sur la voie publique et ne peut les faire verser sur le fonds de son voisin ». En revanche, l’article 640 de ce même Code civil institue une servitude légale d’écoulement des eaux pluviales à la charge des terrains en contrebas. Il en résulte que si votre terrain est en pente et que la propriété voisine se trouve sur son cheminement, l’écoulement ne peut être bloqué et les eaux pluviales peuvent s’évacuer naturellement vers les terrains en contrebas, chez vous et chez votre voisin. Le Code civil indique également que ces eaux, une fois tombées au sol, deviennent votre propriété et que vous avez ainsi le droit de les collecter à l’aide, par exemple, d’un système de récupération d’eau de pluie pour votre propre usage, comme l’arrosage du jardin.
Indispensable gouttière
La canalisation de l’eau présente des enjeux importants en matière de respect de protection du logement. En effet, les eaux pluviales doivent être évacuées au mieux pour éviter tout problème d’humidité ou d’infiltration dans la maison. Différents types d’évacuation sont possibles à condition de respecter la réglementation locale, éventuellement précisée par la commune dans son PLU (Plan Local d’Urbanisme).
La gouttière reste l’élément incontournable pour que les eaux pluviales s’écoulent correctement. Celles-ci doivent associer qualités esthétiques et techniques et leur installation est encadrée par la norme NF P 36-201 (DTU 40.5). Par ailleurs, si elle est visible côté rue, elle doit en principe faire l’objet d’une autorisation de la mairie. Le dimensionnement des gouttières dépend de la surface du toit ainsi que de la pluviométrie de la région, mais pour un fonctionnement optimal, les gouttières doivent respecter une légère pente qui va de 2 à 5 mm par mètre. Elles se composent d’éléments horizontaux et verticaux qui reposent sur des crochets fixés sur la planche de rive de la toiture ou sur le mur pour les tuyaux de descente. La descente peut être apparente ou encastrée. Dans le cas d’un encastrement, le tuyau de descente se situe alors à l’intérieur de l’habitation, dans une gaine technique ou une pièce inhabitée comme le garage ou la chaufferie. De manière générale, les descentes doivent, de préférence, être dans le même matériau que celui des profilés de gouttière et il est préférable de faire le choix des divers éléments dans une même marque pour être sûr de trouver tous les dispositifs de raccordement assurant l’étanchéité : coude, naissance, jambonneau, etc. En bas de chaque descente, des regards, généralement préfabriqués en béton, en PVC ou en fibrociment, permettent de raccorder les gouttières aux différents tuyaux d’évacuation enterrée. Ils comprennent un chapeau amovible pour faciliter l’entretien et le curage des canalisations.
Les gouttières en PVC : un choix de raison
Côté esthétique, on distingue deux principaux types de gouttière : pendante ou rampante, à choisir en fonction de l’inclinaison du toit, de sa surface et de la façade. La gouttière pendante est la plus courante et peut être demi-ronde, carrée, profilée ou moulurée. Les gouttières rampantes sont dites havraises, ardennaises, lyonnaises, nantaises ou anglaises et ne sont préconisées que lorsque la pente du toit est très importante. Elles se présentent comme un couloir circulaire ou triangulaire dont l’angle est plus ou moins relevé et sont très discrètes le long du toit. Quelle qu’elle soit, la gouttière existe dans différents matériaux : PVC, zinc, aluminium ou cuivre, à choisir selon votre budget, mais aussi des qualités techniques requises. Léger, bon marché, le PVC est proposé dans une large palette de coloris. Il se pose par simple emboîtement ou/et par collage et se coupe à la scie à métaux pour s’adapter aux dimensions voulues. De nombreuses pièces de jonction préfabriquées et un tas d’accessoires optimisent la mise en œuvre des gouttières en PVC. Cependant, ce matériau résiste mal aux intempéries et est fortement déconseillé dans les régions soumises à de forts écarts de température. Le tarif d’une gouttière en PVC est à partir de 20 € le mètre linéaire, jusqu’à plus de 70 € pour des formes plus sophistiquées.
Critères esthétiques
Également très léger mais surtout malléable à l’envie, l’aluminium est particulièrement résistant à la corrosion. Il se décline dans un grand nombre de coloris laqués et peut décliner des profils en corniche particulièrement appréciés pour les architectures contemporaines. Avec les gouttières en aluminium, on peut éviter la multiplication des soudures, mais une mise en œuvre par un professionnel est requise. Ces gouttières peuvent d’ailleurs être fabriquées en continu sur le chantier à partir d’un véhicule-atelier. La fourchette de prix d’une gouttière alu est comprise entre 65 et 180 € le mètre linéaire pose incluse. Le zinc est le matériau traditionnel des gouttières et ses différentes sections sont posées par emboîtement et soudées. Promettant une grande durabilité, jusqu’à 50 ans, le zinc résiste à toutes les températures et à toutes les corrosions. Gris d’origine, il se patine légèrement et lentement sous l’effet de l’oxydation. Le prix d’une gouttière en zinc est d’environ 100 € le mètre linéaire. Encore plus robuste, mais au prix parfois rébarbatif, le cuivre est surtout recommandé pour son cachet esthétique, mais il faut savoir qu’il s’oxyde vite, changeant alors de couleur pour arborer des nuances vertes. Comptez entre 50 et 100 € le mètre linéaire pour une gouttière en cuivre hors pose à laquelle il faut ajouter les prix des colliers en cuivre, jusqu’à plus de 10 € pièce. Par ailleurs, le cuivre est actuellement très recherché par les personnes mal attentionnées. Il est donc prudent de ne pas faire l’impasse sur la solidité des fixations.
Évacuer l’eau naturellement ou pas
Avant de commencer vos travaux, renseignez-vous en mairie pour savoir s’il existe un réseau collectif destiné aux eaux pluviales. Ce réseau peut être unitaire, c’est-à-dire commun à l’évacuation des eaux usées et pluviales, ou séparatif, les eaux usées et les eaux pluviales étant alors distinguées.
Dans un réseau séparatif, les eaux usées sont dirigées vers les stations d’épuration et les eaux de pluie vers le milieu naturel. En l’absence d’un réseau collectif, vous pouvez mettre en place un système individuel. Laisser couler l’eau dans votre terrain constitue la solution la plus naturelle pour évacuer les eaux de pluie. Elle préserve l’écosystème et participe à la dépollution des sols. Si votre terrain ne permet pas cette répartition, il faut envisager d’autres solutions comme la création d’une tranchée drainante ou d’une noue. La tranchée drainante ou infiltrante se compose de sable, de gravillons et de galets, au fond de laquelle un tuyau de drainage perforé est enfoui. Il est généralement entouré de gravier et de feutre géotextile pour empêcher les racines de boucher les perforations. La noue permet à l’eau pluviale de s’infiltrer doucement dans le sol jusqu’aux nappes phréatiques, tel un bassin de rétention sec. Ses dimensions dépendent du besoin en infiltration. Elle peut prendre la forme d’un fossé végétalisé composé de plusieurs couches : un géotextile, un concassé drainant, une couche de réglage, un substrat et une couche finale de végétation, souvent stabilisée à l’aide d’une structure alvéolaire. On peut aussi tirer parti de la végétation pour absorber l’eau de pluie. Elle limite le ruissellement et filtre les polluants. Vous pouvez aussi envisager la création d’une toiture végétalisée qui vous permettra d’éviter les infiltrations et les inondations, tout en participant activement à l’isolation de votre maison. Cette toiture végétalisée permet de temporiser le rejet des eaux pluviales et d'écrêter les pics de pluviométrie. C’est le substrat qui joue un rôle d'éponge, se gorgeant d'eau. Une toiture végétalisée extensive standard sur une épaisseur de 8 cm peut collecter jusqu’à 30 m3 d’eau /m2. Une fois que le seuil de saturation est atteint, la pluie excédentaire est dirigée vers le drain pluvial puis éventuellement vers un système de récupération.
Les autres solutions à envisager
Creuser un puisard ou puits d’infiltration est une autre solution recommandée si vous ne disposez pas de système d'évacuation au tout-à-l'égout. En fonction de la nature du sol et de sa perméabilité, il est souvent nécessaire de creuser plusieurs puits dont la profondeur peut varier de quelques mètres à une dizaine de mètres. Remplis de cailloux, ces puits permettent à l’eau de s’écouler lentement puis d’être évacuée vers des parois perforées. Les puits doivent être placés en bas d’une pente, à au moins 5 mètres de votre maison et au moins 30 mètres d’une source. Attention aussi aux grands arbres trop proches dont les racines risquent de percer le puisard. Vous devez aussi vous renseigner en mairie pour connaître la profondeur de la nappe phréatique la plus proche. Si elle est trop près, l’implantation d’un puisard est interdite. Le siphon de cour est un équipement encastré dans le sol qui évacue les eaux pluviales se répandant sur une surface non absorbante (comme du béton ou du pavé) et les dirigeant grâce à un système de canalisations vers les réseaux de traitement. Il se scelle au mortier après avoir créé la pente d’écoulement et réalisé les percements nécessaires pour y raccorder leur tuyau d’évacuation par collage. On peut enfin installer une cuve de stockage, enterrée ou pas, qui n’a pas pour objectif de laisser s’infiltrer l’eau, mais au contraire de conserver cette précieuse ressource.
Récupérer l’eau de pluie
Un récupérateur d’eau de pluie ou une cuve permettent de stocker l’eau de pluie afin d’éviter de la gaspiller et de réaliser des économies. Cette eau de récupération peut servir à l’arrosage du jardin, à l’entretien du mobilier extérieur ou encore être raccordée au réseau d’eau sanitaire pour alimenter les WC. On ne peut pas en revanche s’en servir pour laver chez soi une voiture, un tel lavage induisant le rejet de substances polluantes…Une cuve peut être enterrée ou non et être alimentée par les gouttières ou connectée à une tranchée drainante. Attention, les gouttières en cuivre ou en aluminium sont peu compatibles avec la récupération de l’eau de pluie, car elles peuvent véhiculer une certaine toxicité rendant l’eau impropre pour l’arrosage par exemple. Évidemment, cuve ou récupérateur d’eau doivent être opaques afin de conserver une eau la plus limpide possible. Le récupérateur extérieur à poser, en polyéthylène ou polypropylène, supporte les variations de température et se ferme à l’aide d’un couvercle sécurisé pour éviter tout accident. Pour être conformes à la réglementation, les réservoirs doivent aussi comporter un dispositif d’aération et une arrivée d’eau en fond de cuve, alimentée par un robinet. L’idéal est de les placer sous la descente d’eau pluviale afin qu’ils se remplissent dès qu’il pleut. En général, ils sont tout simplement posés au sol. Certains sont équipés d’un trop plein. Il en existe des ronds, des rectangulaires, de toutes formes, beige, vert, imitation bois. Des cuves « premiers prix » à environ 20 euros aux cuves esthétiques se fondant dans le paysage à près de 150 €, la palette, tant au niveau des modèles que des prix, est large.
Organiser la récupération
On peut envisager d’enterrer sa cuve de récupération d’eau pluviale, mais cette solution est souvent envisagée dès la construction de la maison quand on dispose encore des engins de terrassement sous la main pour creuser le trou. Ces cuves ont l’avantage de conserver l’eau à l’abri de la lumière et à la température du sol, la protégeant du gel et de la chaleur et la rendant utilisable toute l’année. Il faut disposer un lit de sable d’au moins 20 cm pour éviter tout risque de déformations. Si vous devez rouler ou stationner à l’endroit où est installée la cuve, il est prudent de prévoir une maçonnerie supplémentaire. Il faut aussi penser aux diverses tranchées qui vont ramener l’eau des toits de la maison. Les cuves enterrées sont soit en béton soit en PEHD (polyéthylène haute densité). Le prix d’une cuve en béton est plus intéressant, mais la pose nécessite un budget plus conséquent. Comptez de 500 à plus de 3 000 € HT et hors pose. La TVA est de 5,5 % si votre maison a plus de 2 ans et si la pose est réalisée par un professionnel.
Entretien nécessaire
Un entretien régulier des gouttières et des chéneaux est à prévoir pour éviter les bouchons générant des fuites et des infiltrations. Cela permet aussi de détecter certains désordres. Pensez à utiliser des crapaudines au départ de la descente pour filtrer et retenir les feuilles mortes et débris de toutes sortes. En cas d’obstruction d’une gouttière, un passage de caméra peut être utile pour vérifier où se situe le problème. De même, un nettoyage complet du regard permet d’éliminer toutes les pollutions agglomérées.
Un curage du réseau peut être nécessaire : il peut être réalisé avec un nettoyeur haute pression, mais il est prudent de faire appel à un professionnel qui pourra faire un diagnostic en cas de problème et qui dispose de tout le matériel nécessaire quel que soit le système d’évacuation mis en place.